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CAMILLE NEPVEU - ABYSSES

« C’est en se tenant assez longtemps à la surface irisée que nous comprendrons le prix de la profondeur. »

 

Gaston Bachelard

L’eau et les rêves (1942)

 

Il est de ces abysses auxquels nul n’a accès : creusés de grottes, peuplés de formes de vies primitives, ils recèlent la matière originelle de tout ce qui portera un nom. Ce fond noir, caractéristique des œuvres de Camille Nepveu, n’est pas un vide, mais bien la condition de possibilité même de ce qui émerge à la surface. C’est la lumière qui, dans un jeu de dévoilement partiel, met au jour certains éléments d’un système organique complexe. L’œil et l’esprit y appréhendent à la fois le mystère et la fragilité de la vie.

 

La technique de collage suit ce processus qui consiste à remonter, en couches successives, de l’inconnu vers le perceptible. L’engagement environnemental de l’artiste est intimement lié à cette technique, qui fait usage de papiers recyclés, pour évoquer des massifs de coraux et leurs étranges habitants. On ne peut, cependant, jeter sur ces tableaux le regard tranquille de qui se sait en contrôle ; au contraire, l’incertitude et l’étrangeté engendrées par l’œuvre soulèvent des questions sur la nature des éléments qui la composent.  Devant l’état actuel des écosystèmes, et plus particulièrement du monde marin, qui peut encore croire que les océans ne recèlent que du vivant ? Comment distinguera-t-on les vivants de ce qui les étouffe ?

                                                                                                 

Les tableaux de Camille Nepveu sollicitent inlassablement la frontière entre le regard et son objet, l’humain et son environnement, la profondeur matricielle et la superficialité du connu. Ils interrogent ainsi aussi bien notre rapport à un écosystème que notre identité personnelle, toujours ancrée dans le flou du souvenir et le jeu des apparences.

 

(English version)

 

Down in the depths, unreachable abysses are hollowed by grottos and rife with primitive forms of life ; they harbor the original matter of all that will be named. This black backdrop, typical of Camille Nepveu’s artworks, does not reflect emptiness, but rather evokes the very possibility of what might reach the surface. Elements of complex organic systems are then gradually revealed through the use of light, making it possible for both mind and eye to grasp the mysterious and fragile nature of life.

 

The collage technique follows this process, with successive layers leading from the unknown to the visible. The artist’s environmental commitment is closely linked to this technique, as she makes use of recycled papers to evoke coral reefs and their inhabitants. One cannot, however, gaze at these artworks and feel completely assured of what lurks within them ; on the contrary, one is troubled by the uncertain and strange nature of that which is represented. Faced with the endangerment of all ecosystems, more particularly marine areas, how can we still believe that oceans are strictly populated by living beings ? How will we distinguish between the living and what suffocates them ?

 

Camille Nepveu’s works untiringly question the boundaries that separate the gaze from its object, humans from their environment, and generative depths from the superficiality of everything knowable. In doing so, they confront our relation to ecosystems, as well as to personal identity; the latter is endlessly bound to a game of memory and appearances.

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